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Politik

3 mars 2004

Vous aimeriez sans doutes que je croie à la vertu

Vous aimeriez sans doutes que je croie à la vertu de J ? A dire vrai je ne puis m'y résoudre, et j'aurais autant de contrariété à le juger probe qu'à croire vicieux le samaritain loué par l'auspice. L'humanité n'est parfaite dans aucun genre, ni dans ce que vous appelez mal ni dans ce qu'on conçoit du bien, les gredins possèdent vertus, comme l'honnête homme a ses faiblesses. Cette vérité me paraît d'autant plus utile à croire, que c'est d'elle que dérive l'indulgence pour les méchants comme pour les bons, qu'elle préserve ceux-ci de l'orgueil et sauve les autres du découragement. Il ne me sera pas donné de scruter les motifs de l'action de J; j'aimerais croire qu'ils sont louables: mais en a-t-il moins consacré sa carrière à porter dans les foyers qui l'accueillirent, la colère, le déshonneur le scandale ? Il y a bien sûr ce malheureux secouru, les noyeurs en dissimulent toujours un c'est une dague en manche; n'y a t'il pas en choeur le cri de cent victimes ?

Stupéfait de la candeur avec laquelle vous le défendez, j'ai à prévenir les objections qui, inéluctablement seront faites. Vous me citerez une statue déboulonnée, quelques coups de feu au ciel de cette ville; vous me demanderez pourquoi il est reçu chez les travaillistes; vous me direz que loin d'être rejeté par les gens honnêtes, il est admis comme chez lui par la bonne compagnie. Je peux, je crois, répondre à tout.

Il est peut-être trop fait cas de ce qui parfois pourfend les grands écueils, la force. Alors que sont portés au pinacle les attributs puissants de ceux qui réforment leur condition, je retorque que parfois il vaudrait mieux peut-être savoir s'en satisfaire; c'est un guide adroit que l'acceptation d'une nature à laquelle on ne veut rien changer. Ainsi l'effigie jetée à terre n'aurait jamais été dressée si les metteurs en ordre ne souffraient pas du même travers que leur conducteur. Les coups de feu, eux sont attiques et touchantes manifestations de liesse qui font penser aux grognements que ne devaient pas manquer de moduler les singes avant les hommes. Ils ne sont pas donc la meilleure enseigne d'une civilisation avérée. Pour ce qui est des amitiés entretenues avec la gauche britannique, il faut vous souvenir de l'extrême indigence couplée à la formidable confusion de valeur qui condamnent l'Europe au rôle de camériste. Nous pourrions nourrir un milliard de bouches de notre seule histoire et nos arts mais semblons,- je ne sais quelle sorcellerie a fabriqué cela - préférer la prestesse ingrate et la roturière prestance. Sans doute Voltaire et sa manie des marchands n'est elle pas étrangère à une telle curée. Souvenez-vous aussi des donneurs de leçons qu'ils sont tourne-casaque dés lors que la qualité du discours prend le pas sur la vérité du coeur. Savez-vous quelque chose de plus cruel que le regard de Chimène quand il est détourné de nous ? C'est une inconséquence à ajouter à mille autres qui gouvernent la société. J, avec un beau nom, une fortune sûre, a su de bonne heure qu'asseoir empire en société, c'était manier, avec un égal tempérament la flatterie et le ridicule. Nul ne possède comme lui cet ubique talent : il séduit l'un, se fait craindre de l'autre, on ne l'estime pas, on le flatte. Voilà son existence au monde qui, plus prudent que courageux, incline à le ménager plutôt qu'à l'affranchir.

Enfin, vous devez croire mon vieil ami, que je reste sensible à l'expression des peuples comme l'indicateur le plus sûr des révolutions à faire ou à défaire. Mais cette voix, nous ne l'entendons pas s'exprimer au présent car les faits ont cette déplorable propriété acoustique de travestir ce que rue vocifère. Ce n'est qu'une fois l'acte et l'actuel éteints que l'on prend connaissance de ce qui était vécu, et de ce qui reste à vivre.

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2 mars 2004

Démocratie

Entendez-les s'en gargariser, s'en rengorger, grimpés au faîte de leurs ergots, écoutez-les se flatter de ça, ce truc que nous avons-pas-eux, notre distinguée culminance qui donne droit, voyez nos cuisses de Jupiter, nos remarquables souches, nos racines plus profondes. Savez-vous l'incontestable de nos tickets to ride ?  Nous détenons le passe-partout, l'universel visa, nous possédons la coupe sacrée, le Graal : la démocratie.

Quelle démocratie ? Celle qui me force à l'urne (sous peine de désertion) à choisir entre pire et pire-que-pire ? Celle qui profite du show-business international pour passer en force le 49-3 au mépris de l'absolue majorité ?  Cette démocratie qui autorise un coupe-jarret non élu à mener sa rixe contre l'avis des institutions de droit ?  Celle qui me demande de me prononcer au sujet de dossiers auxquels je ne comprends goutte et sur lesquels il m'est impossible de rassembler une information cohérente ? C'est là que bât devient schlague : comment nommer un système qui n'éduque pas plus qu'il n'enseigne, qui pratique la rétention du savoir, qui favorise un appareil médiatique industriellement partisan et qui fabrique fausses preuves et faux rapports ?

Quelle prétention ! Quelle insupportable pédanterie ! Quelle ubuesque crétinerie que de croire que nous avons jamais accédé à la démocratie. Qu'on éduque ! Qu'on enseigne !  Qu'on lise, qu'on questionne, qu'on reconnaisse la curiosité, le silence comme prémisses réalistes de l'intelligence plutôt que de se pâmer à la glose diarrhéique des bavards et des bruiteurs ! Quand je pense qu'on supprime les postes d'assistants scolaires pour embaucher des matons... parlez-moi de démocratie, et je vous fous mon poing sur la gueule, sauf quoique ce soit que je vous doive, ce dont je doute au demeurant.

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